De Théhillac à Redon
- Publié le Vendredi 27 septembre 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°77]
Je suis arrivé à Redon en début d’après-midi mais, grève de la SNCF oblige, le seul train restant pour Paris part à 19 heures. J’ai donc eu plusieurs heures devant moi pour finir de profiter de cette dernière journée. Après avoir visité la ville et passé un long moment à l’intérieur de l’Abbaye Saint-Sauveur, je me suis installé à la terrasse du petit café où j’écris ces lignes avec devant moi une bouteille de Breizh-Cola.
Il y a 4 ans presque jour pour jour, quelque part après le Mont-Saint-Michel, je buvais le premier Breizh-Cola de ce Tour de Bretagne. Entre les deux, il y a eu environ 1 827 kilomètres et 77 journées de marche. Beaucoup de belles journées, quelques-unes moins bonnes — et les plus récentes ne font pas partie des meilleures — plusieurs bivouacs splendides, quelques belles rencontres, de nombreux moments de solitude heureuse et de légèreté.
Je garde particulièrement en tête certains lieux, certaines sensations : le tour du Cap Fréhel, mon arrivée à Tréguier le jour de la Saint-Yves, les dénivelés de Saint-Jean-du-Doigt, le tour des trois Abers, mon bivouac à Crozon sur le sillon des Anglais, l’isolement de bout du monde du Cap Sizun, les neuf compères de Pont-Aven, le tour de Belle-île… Et de nombreux autres souvenirs gardés au frais dans mon carnet de route et parfois dans ce blog.
C’est déjà du passé. La vie continue. Je sirote mon soda en pensant à l’avenir et à mon futur long voyage à pied. Mais il est encore un peu trop tôt pour que j’en parle ici.
D’Arzal à Théhillac
- Publié le Jeudi 26 septembre 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°76]
J’ai commencé hier à remonter la Vilaine, marchant le plus souvent à quelque distance du fleuve, dans les bois ou entre des champs, jusqu’à Arzal où se trouve un barrage dont le but n’est pas de produire de l’électricité mais de servir de protection contre les grandes marées qui ont par le passé causé de grands dégâts jusqu’à Redon.
Les chemins par ici sont le plus souvent enfermés entre deux haies s’appuyant contre des clôtures électrifiées, ce qui est aussi efficace pour empêcher les vaches de sortir du champ où elles paissent que pour empêcher les randonneurs désireux de poser la tente d’y entrer. Je commençais donc, la nuit s’approchant, à me demander si je ne serais pas obligé de continuer à la frontale jusqu’à la Roche-Bernard quand un petit miracle s’est produit : en bord de sentier, un petit pré sans clôture… et sans vache !
Et ce matin, après une bonne nuit, quelle surprise ! Il faisait certes gris et moche, mais il ne pleuvait pas. J’ai rejoint, par les mêmes petits chemins creux, boueux et glissants, la Roche-Bernard où j’ai traversé le fleuve. Quelques kilomètres plus loin, vers Nivillac, j’ai même profité de quelques rayons de soleil pour déjeuner au bord de l’eau. Je suis reparti juste à temps pour profiter au maximum des plaisirs de la marche sous la pluie. Jusqu’au soir il a plu sans arrêt, le crachin n’étant interrompu que par les averses.
Malgré ce temps pourri, ce fut une journée agréable pendant laquelle j’ai marché à mon rythme au bord de l’eau, le plus souvent perdu dans mes pensées. Songeant à mon futur périple, j’étais finalement heureux de pouvoir vérifier l’efficacité de mon système de protection contre la pluie. La veste imper/respi et le pantalon de pluie m’ont bien protégé sans que je sois mouillé de transpiration et le parapluie est définitivement un accessoire très utile, à condition que le vent soit faible. Les poggies fabriquées à partir d’un vieux parapluie pour me protéger les mains sont vraiment utiles (en fait, je n’en ai utilisé qu’une seule puisque, sur le plat, je marche avec un seul bâton). Système testé et approuvé donc !
Pas de souci non plus avec mon sac à dos Hyberg en cuben qui demeure parfaitement étanche. Je pense néanmoins qu’il faudra que je le remplace pour mon voyage vers Syracuse par un sac un peu plus grand – et lui aussi étanche car c’est un avantage dont je ne veux plus me passer.
Pendant que je réfléchissais ainsi, mes jambes ont fonctionné toutes seules et elles n’ont pas chômé. En fin d’après-midi, il est devenu évident que mon étape de demain serait la dernière de ce Tour de Bretagne et que j’arriverais à Redon en milieu de journée. Ça sent la fin !
De Muzillac à Arzal
- Publié le Mercredi 25 septembre 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°75]
Réveil en douceur ce matin dans la chambre de ce petit hôtel sans prétention où j’ai bien dîné et bien dormi. Je me sens requinqué et pas particulièrement pressé de me lever tandis que j’écoute la pluie plic-ploquer sur les ardoises du toit.
Allez, il est presque 9 heures, en route. Mais d’abord, quelques courses au Carrefour City de Muzillac. Un paquet de chips, deux tranches de rôti de porc, des amandes, de la semoule, un gros morceau de parmesan et des biscuits au chocolat blanc genre Fingers, histoire de marier plaisir et calories. La boulangerie est sur mon chemin, ce serait faire offense à la boulangère de passer sans lui acheter un pain aux raisins pour mon petit déjeuner et une petite miche pour plus tard.
Le tout est débarrassé de ses emballages (sauf les chips !) et reconditionné dans des ziplocs pour prendre moins de place et peser moins lourd. C’est impressionnant de voir le volume de tous les emballages (papier, plastique, carton…) que je dépose dans une poubelle avant de me remettre en chemin, bien alourdi quand même.
Il ne se passe pas dix minutes avant qu’il recommence à pleuvoir — mais à vraiment bien pleuvoir — tandis que je gagne Billiers, puis la pointe de Penn Lann où je vais quitter le bord de mer. C’est là, en effet, que se trouve l’embouchure de la Vilaine dont je vais désormais remonter le cours pour finir mon tour de Bretagne.
Pour fêter dignement cet adieu provisoire à ma compagne de tant d’étapes de marche, rien de mieux qu’un déjeuner d’huitres et de fruits de mer dans un restaurant quasi-désert avant de remettre veste et pantalon de pluie et de repartir sous les trombes d’eau. Une chose est sûre, je ne regrette pas d’avoir emporté un parapluie.
De Penvins à Muzillac
- Publié le Mardi 24 septembre 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°74]
Il a plu toute la nuit. Les vaches ne sont pas revenues. J’imagine que, même sous la pluie, la nuit, les vaches dorment, et elles ont bien raison !
Moi aussi, bercé par le bruit de la pluie sur la toile, j’ai plutôt bien dormi. Un sommeil par tranches d’une heure trente entrecoupé de rêves, comme à chaque fois que je bivouaque. Il est probable que je ne rêve pas plus que d’habitude, mais que le fait de me réveiller plusieurs fois par nuit de manière plus consciente que dans mon lit — justement parce que je ne suis pas dans mon lit — m’amène à me rappeler les rêves que je faisais juste avant chaque réveil.
À 6h30, il faisait encore nuit et il pleuvait toujours à verse. Autant dire que je ne me suis pas pressé pour sortir du sac de couchage et pour ranger mes affaires. J’ai senti d’emblée que cette journée serait sans attrait, longue et terne. Effectivement, comme hier, j’ai marché sous une pluie continuelle, dense, qui faisait comme un rideau empêchant de voir quoi que ce soit autour de moi. C’est donc sans grand plaisir que j’ai posé un pied devant l’autre sur des chemins boueux, sur des routes secondaires désertes, sur une longue piste cyclable rectiligne, et sans jamais voir la mer.
Qui plus est, depuis hier j’ai mal dans la fesse gauche et, depuis ce matin, le long de la jambe gauche. Si ça n’est pas une sciatique, je ne sais pas ce que c’est… Tout à fait ce dont j’avais besoin pour améliorer mon moral. Faut pas vieillir, mon bon Monsieur !
Bon. Il est 16h30, j’ai du mal à marcher, il pleut toujours, ça suffit pour aujourd’hui. À l’entrée du bourg de Muzillac, un hôtel inattendu me tend les bras. Trop heureux de cette première bonne surprise de la journée, je m’y engouffre sans y réfléchir ne serait-ce qu’une seconde. Une bonne douche chaude, un bon repas chaud, un bon lit chaud, voilà tout ce dont j’ai besoin ce soir. Demain sera un autre jour.
D’Arzon à Penvins
- Publié le Lundi 23 septembre 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°73]
Après une nuit sous la flotte, une journée sous la flotte… Le tour de la presqu’île de Rhuys se résume pour l’instant pour moi en une marche quasiment à l’aveugle, dans la pluie et le vent et sur une portion de territoire finalement très urbanisée.
J’ai connu plus agréable, mais comme disent les États-uniens : « Embrace the suck » ! OK… Je fais de mon mieux, mais la réussite est mitigée. Je commence à en avoir marre de marcher sous des trombes d’eau depuis deux jours. Les bons points dans tout cela, puisqu’il faut toujours chercher à voir le positif, c’est que parapluie et veste de pluie font bien leur boulot et que mon sac à dos est parfaitement étanche.
Le soir venu, entre les étangs, les marécages, les zones pavillonnaires et les propriétés privées entourées de barbelés, j’ai cherché pendant longtemps un endroit où bivouaquer. Je me suis enfoncé vers 17 heures dans un bois de chênes où j’espérais trouver un coin où planter la tente mais le sol sous les arbres était vraiment trop détrempé. En me frayant un passage à travers des branches et des ronces, j’ai réussi à en sortir pour pénétrer dans un grand pré apparemment vide. Apparemment.
Une fois l’abri monté, bien bas et le dos dirigé vers l’ouest en raison du fort vent de bord de mer, j’ai dîné froid sous la tente et me suis préparé à dormir tôt. Sauf que 19h30, c’est l’heure où les fauves — enfin, les vaches — vont boire… Je n’avais pas remarqué qu’à 60 mètres de l’endroit où j’avais monté la tente, au coin du pré, se trouvait une mare.
Six vaches étonnées ont tourné autour de la tente où je m’étais déjà allongé au sec, m’obligeant à en sortir pour leur faire comprendre que l’abri n’était pas comestible et que les haubans n’avaient pas besoin de leurs sabots. Elles ont eu l’air de comprendre mes explications ; en tout cas elles sont assez vite parti se désaltérer. Au retour, il m’a suffit de quelques exclamations inamicales pour qu’elles passent leur chemin et retournent à l’autre bout du pré.
J’espère qu’il ne leur viendra pas l’idée de revenir dans le coin pendant la nuit pour boire un coup entre copines.