D’Auray à Botconan
- Publié le Mardi 26 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°68]
Matinée charnière. Maintenant que j’ai fini le tour de Belle-Île, il me faut regagner Auray pour poursuivre le cours « normal » de mon tour de Bretagne. Après la soirée d’hier (lessive, toilette, rasage, crêperie), je me suis couché vers 21 heures et ai dormi d’un sommeil profond jusqu’à 7 heures du matin. L’avantage de dormir sous un toit – outre le fait qu’on soit dans un lit – c’est qu’on peut partir sitôt réveillé ou presque, sans avoir besoin de ranger tout son barda.
Après un détour par la boulangerie (mais ce n’était pas la même sympathique boulangère, adepte de randonnée, que samedi matin), je prends un billet sur le Bangor, départ à 9h45. Comme à l’aller, je m’installe sur le pont supérieur, bien emmitouflé car, s’il fait toujours aussi beau, il fait vraiment bien froid. À Quiberon, j’attrape le bus pour Auray où j’arrive peu avant midi pour un nouveau départ à pied, depuis cette gare où je suis arrivé et ai repris le train pour Paris il y a presque sept mois.
C’est une marche très différente de celle des jours précédents, quasiment sans dénivelé, sur des chemins tantôt champêtres, tantôt forestiers, longeant la rivière d’Auray et son affluent la rivière du Bono. Les paysages sont beaux et reposants, avec, à marée basse, de vastes zones de schorre où les oiseaux picorent leurs repas.

Alors que je remplis ma bouteille au robinet du cimetière du Bono, mes yeux se posent, par-dessus le mur d’enceinte, sur mon premier cerisier en fleurs de l’année. Vite, un vœu !
L’anse de Govillo est située dans un repli de la rivière du Bono. C’est là que beaucoup de bateaux sont amenés pour y finir leur vie. Plusieurs dizaines d’épaves gisent ainsi côte à côte sur la vase, donnant au lieu un caractère mélancolique. On ne peut s’empêcher de penser à la finitude dans un tel cimetière, près de ces carcasses qui pourraient aussi bien être des éléphants…

Près du hameau de Botconan, j’installe mon bivouac dans un bois de hêtres dont beaucoup sont morts et ont été livrés aux bûcherons. La préparation du terrain est un peu fastidieuse ; elle nécessite un nettoyage du sol méticuleux pour retirer les ronces et les débris, à un endroit que j’ai choisi un peu dégagé pour ne pas risquer qu’une branche morte y tombe pendant la nuit. Il me faudra plus d’une demi-heure, pratiquement centimètre par centimètre, pour être certain de ne pas laisser en place une épine traîtresse et perforatrice de matelas gonflable.
De Pouldon au Palais
- Publié le Lundi 25 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°67 - Belle-Île 3/3]
J’ai encore passé une excellente nuit. Il a fait +2°C au plus bas, je n’ai pas eu froid sous ma tente laissée grande ouverte, et au réveil il n’y avait pas la moindre condensation sur la toile. Prendre la Plexamid était décidément le bon choix. Départ vers 8h30, temps superbe aujourd’hui encore, et aujourd’hui encore des descentes, des remontées, des descentes, des remontées… Jusqu’à Port Andro, cela n’arrêtera pas, dur dur par moments.
Sur cette île, on voit la mer partout, mais le plus souvent on la voit de loin, ou d’en haut. Même quand on descend (avant de remonter, bien sûr…), c’est souvent un peu à l’intérieur des terres, pour franchir un ruisseau. Atteindre la mer, lorsque c’est possible, nécessiterait alors de faire un détour pas forcément facile en suivant le ruisseau. Donc, la mer, on la voit beaucoup, on ne l’approche pas tant que cela.

Mais finalement, la pointe arrive et peu de temps après c’est la récompense à mes efforts : une famille de bouquetins, papa, maman et ado bouquetins, assez peu farouches pour continuer à grignoter des jeunes pousses à quelques mètres de moi pendant plusieurs minutes. Ils font mine de ne pas prêter attention à moi mais j’ai bien compris leur manège : en fait, ce sont de vrais cabots qui posent sans en avoir l’air pour mes multiples photos.
Après cet intermède animalier, nouveau détour, cette fois-ci vers le cimetière de Locmaria, pour chercher de l’eau – j’ai fin par consommer toutes mes réserves – puis retour sur la côte. Déjeuner sur la plage de Port-Andro, suivi d’une petite sieste au soleil avant de repartir pour la portion la plus facile du parcours, jusqu’au Palais.
Arrivé au Palais peu avant 19 heures, que faire ? Je pourrais reprendre tout de suite le bateau mais une fois à Quiberon, où trouverai-je à la nuit tombée un bivouac dans le sud urbanisé de la presqu’île ? Quitte à devoir y chercher un hôtel, autant reprendre ici la même chambre que vendredi soir (et retourner dîner dans la même excellente crêperie). Aussitôt pensé, aussitôt fait. Attention bonhomme, tu t’encroûtes !
Tour de Belle-Île : au total, environ 79 km et 1.650 m de dénivelé positif et négatif.
De Borcastel à Pouldon
- Publié le Dimanche 24 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°66 - Belle-Île 2/3]
Comme souvent en bivouac, je me suis réveillé plusieurs fois pendant la nuit mais à chaque fois je me suis très vite rendormi après avoir simplement changé de position. L’association duvet + sursac m’a permis de ne pas avoir froid alors que j’avais laissé les ouvertures de la tente grandes ouvertes. J’avais craint hier soir d’être gêné par la lumière du phare des Poulains qui traversait la paroi translucide de la Plexamid, mais cela n’a pas été le cas.
J’ai le plaisir de voir au matin qu’il n’y a pas la moindre ébauche de condensation sur la toile. C’est sans doute dû en partie au fait d’avoir gardé la tente ouverte, probablement aussi à mon choix d’un site de bivouac un peu éloigné de la mer et sous le couvert des arbres. De fait, alors que le sol de la minuscule pinède où j’ai dormi était parfaitement sec, il suffira que je me rapproche de la mer pour marcher sur un sol détrempé.
Il fait très beau : le ciel est bleu, il n’y a pas un nuage et pratiquement pas de vent. Il ne fait pas chaud, en revanche, et la doudoune n’est pas de trop pour marcher. Parti peu après huit heures, je me dirige d’abord vers le hameau de Kerguec’h avec l’espoir d’y demander de l’eau, mais un dimanche matin à cette heure-là il n’y a que les chiens qui soient réveillés lorsque j’y arrive (certes, avec le raffut qu’ils font à mon passage, il est probable que leurs maîtres le sont aussi lors que j’en repars…)
Jusqu’à Donnant, la marche est facile, essentiellement sur de la lande, avec seulement deux ou trois descentes/ montées. À Donnant, je n’ai plus d’eau. Je décide alors de remonter vers le bourg, à 700 mètres, car la carte IGN indique là-bas la présence d’une fontaine. Macache. Il n’y a là qu’un trou boueux au fond d’un amas de ronces. Heureusement, dans le village, un homme courageux s’est levé tôt pour planter des crocus dans son jardin, ce qui me permet de lui demander de remplir ma bouteille d’un litre et également, par prudence vu la rareté des points d’eau sur l’île, ma Platypus de secours.

À partir de Donnant, c’est beaucoup plus sportif. Ça descend et ça remonte à chaque plage, à chaque crique, à chaque ruisseau, avec souvent peu de terrain plat entre deux. Mais les paysages sont magnifiques, la mer s’élance sans cesse à l’assaut de la côte découpée, formant des anses abruptes et des rochers ciselés, comme les célèbres « Aiguilles de Port-Coton ».
La dernière heure de la journée est un peu rude, ce qui m’amène à quitter le bord de mer à 17 heures pile pour me diriger vers une zone repérée sur la carte qui paraît être un petit bois. Et de fait, banco, c’est bien un bosquet, d’ailleurs récemment livré aux bûcherons, au sein duquel je trouve un coin pas trop difficile à débarrasser des branches cassées ou coupées. Comme hier, je vais dormir sur un moelleux tapis d’aiguilles ! Toilette complète, dîner, écriture de ces mémoires, et dodo !


Je l’ai transportée dans deux « gobelaits » (des culs de bouteilles de lait) emboîtés servant de bols, pour un poids total inférieur à cent grammes. C’est pratique à transporter et séduisant en théorie, mais une fois qu’on a mis des aliments – disons,au hasard, de la purée – dans un gobelait, les rainures de celui-ci empêchent de le récurer correctement et on est obligé de ranger la popote dans un récipient mal nettoyé.
J’ai trouvé une parade provisoire en protégeant la popote dans un sac ziploc, mais ce qui est parfait pour ne faire que du café ne l’est donc pas vraiment lorsqu’il s’agit d’y mettre de la nourriture cuisinée. Un point à améliorer, donc.
Du Palais à Borcastel
- Publié le Samedi 23 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°65 - Belle-Île 1/3]
Réveil à sept heures, lever sans me presser, départ à huit heures et demie. J’ai prévu de faire ce tour de Belle-Île dans le sens anti-horaire. Il fait un temps superbe avec un soleil radieux. Un passage à la boulangerie me permet d’acheter un croissant et un pain aux raisins (je ne me refuse rien) et de discuter le bout de gras avec la boulangère. Elle est elle-même férue de randonnée, mais elle n’a pas encore eu l’opportunité de faire tout le tour de son île.
Pour bien commencer la journée, je me trompe immédiatement de chemin en suivant le port jusqu’à l’autre côté du débarcadère, ce qui m’oblige à revenir sur mes pas avant de pouvoir traverser la citadelle Vauban et de sortir de la ville. Première constatation : je ne suis pas en grande forme physique, et j’ai du mal dès que le chemin monte un peu. Il n’y a pourtant pas de longues côtes, mais ça monte et ça redescend sans arrêt, en « casse-pattes », et certaines pentes sont vraiment très… pentues. Bon. Aujourd’hui, cela va donc être « chi va piano… va molto piano ».

Un peu plus tard, je la rejoins alors qu’elle est assise au bord du chemin en grignotant un morceau. Je m’excuse de lui avoir mis la pression un peu plus tôt, on discute et on repart ensemble pour un bout de chemin.
Juliette fait elle aussi le tour de Belle-Île, mais en quatre jours et dans le désordre car elle ne bivouaque pas et n’a trouvé d’endroits où se loger qu’au Palais et à Bangor. Elle a marché hier du Palais à Locmaria d’où elle est retournée en stop à son hôtel du Palais, elle compte aller aujourd’hui jusqu’au phare des Poulains et retourner ensuite au Palais, également en stop, et c’est toujours en stop qu’elle compte aller demain à Locmaria pour en repartir en direction de Bangor.
Quand je lui dis que je vais bivouaquer, elle s’étonne de la petite taille de mon sac et me pose des tas de questions. Je lui parle de la randonnée légère, de ce blog et du forum randonner léger où elle me dit qu’elle ira jeter un œil, et je déballe mon sac sur le bord du chemin pour lui montrer mon matériel. On se quitte au bord de la ria de Sauzon où je m’arrête à mon tour pour déjeuner et faire une petite sieste.
Une fois de l’autre côté de la ria, je profite que les toilettes du port de Sauzon soient ouvertes pour y remplir mes bouteilles avant de me diriger vers la pointe des Poulains. J’ai bien fait d’être prudent car les toilettes de l’Espace Sarah Bernhardt sont fermées, comme est fermé le musée construit dans ce qui fut auparavant un fort, puis la maison de l’actrice.
À partir de la Pointe des Poulains, on passe du côté de l’île exposé au large et en quelques centaines de mètres la mer change du tout au tout. Calme jusque-là, elle devient très agitée alors même qu’il n’y a pas un poil de vent. Le sol, en revanche, est nettement plus plat et régulier. C’est de la lande avec juste quelques « casse-pattes » de 20 ou 30 mètres pour ne pas perdre la main – enfin, les jambes – mais sans plus.

Je continue mon chemin et m’enfonce dans les terres d’environ deux cents mètres, ce qui est suffisant pour trouver un excellent site de bivouac dans une toute petite zone plantée d’un vingtaine de pins dont les aiguilles recouvrent le sol d’un tapis moelleux. J’espère que l’endroit permettra d’éviter les ennuis décrits par mes récents prédécesseurs qui se sont retrouvés trempés au matin. Je saurai cela demain.
Aux marches du Palais
- Publié le Vendredi 22 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Interlude]
Plus de six mois se sont écoulés depuis qu’à Auray j’ai repris le train pour Montparnasse… Entretemps, j’ai randonné sur quelques longs week-ends, j’ai remplacé une partie de mon matériel, j’ai passé beaucoup de temps sur le forum randonner-léger (RL), et j’ai commencé à réfléchir sérieusement à la longue marche que je prévois de faire en 2020 entre Paris et Syracuse.
Un participant du forum RL m’a donné l’idée de faire le détour de Belle-Île, où je n’avais pas envisagé d’aller lorsque je suis passé par Quiberon l’été dernier. J’ai donc ajouté le tour de l’île à ce nouveau tronçon de mon Tour de Bretagne, envisageant de le faire en sa compagnie et en celle de quelques autres marcheurs ultra-légers. Le décalage entre les calendriers scolaires de Bretagne et de l’Île-de-France ne l’a pas permis ; ils sont partis la semaine dernière et ont relaté quatre journées très agréables et trois nuits très humides.
Malgré leurs conseils, j’ai décidé de ne pas emporter ma tente double toit Power Lizard (neuf ans et toujours d’attaque) mais de prendre le risque de l’humidité en étrennant la tente simple toit Plexamid achetée récemment.
Depuis Montparnasse, j’ai rejoint Auray en deux heures et demie, inconfortablement coincé entre un voisin de gauche obèse et un voisin d’en face aux longues jambes. Ensuite, une petite heure de car jusqu’à Quiberon où j’ai pu attraper le bateau de 19h00 pour le Palais. Le soleil se couchait quand le bateau a quitté Quiberon, il faisait nuit en arrivant à Belle-Île. Depuis la mer, on voyait de loin les lumières du Palais, en face, et de Sauzon, plus à droite. Encore plus à droite, le phare des Poulains. À gauche, une lumière rouge qui devrait être celle du phare de la Jument.
Il ne faisait pas froid, mais pas bien chaud non plus. J’ai bien supporté, sur le pont supérieur, l’association micropolaire + doudoune + coupe-vent.
Dîner dans une crêperie sympathique, puis repli dans la chambre d’hôtel réservée il y a une semaine ; simple, propre et pas chère, parfait pour une bonne nuit en prévision des kilomètres à venir.