De Mouans-Sartoux à Cannes

Sur la Côte d’Azur [Étape n°11]


J’ai finalement choisi un autre hôtel, la Croisette, c’est très surfait.

L’étape d’hier avait beau n’avoir été ni très longue ni très escarpée, j’étais épuisé quand je suis arrivé à Mouans-Sartoux que je n’ai pas eu l’énergie de visiter. Dommage, car je me suis rendu compte ce matin en en repartant que cette petite ville devait être un endroit où il fait bon vivre, dynamique sans être submergée par les touristes. J’avais fait un tour au château et à « l’Espace de l’Art Concret » où se trouvait la mosaïque du jour mais avait ensuite immédiatement gagné ma chambre, écrit mon billet du soir et dîné sur le pouce avant de tomber dans les bras de Morphée.

Du coup je me suis réveillé ce matin dans une forme du tonnerre et j’ai un peu rattrapé ma flemme d’hier en faisant, avant de la quitter, le tour de la commune et des nombreuses œuvres de street-art qui parsèment ses rues.

J’ai ensuite repris pour quelques kilomètres la Via Aurelia déjà suivie hier sur la plus grande partie de mon chemin depuis Mandelieu-la-Napoule et bien des fois par le passé. Cette ancienne voie romaine reliait initialement Rome à Luna, en Ligurie, avant d’être prolongée en Gaule et jusqu’à l’Espagne. Je l’ai empruntée en de multiples occasions sur des portions souvent très éloignées les unes des autres et, en fait, je crois bien avoir marché sur ses chemins au moins une fois au cours de toutes mes « longues promenades » depuis 2020 !

Aujourd’hui je l’ai quittée peu avant d’arriver à Mougins où je comptais suivre un peu les traces de Picasso mais ce n’était pas le bon jour : le village était envahi par des milliers de touristes, des dizaines de tentes et de barnums y étaient installées et c’était une cacophonie de musiques et d’annonces enjouées vantant les mérites de produits de bouche ou de diverses sociétés à l’occasion du « 15ème Festival international de la Gastronomie&nbsl;– Les Étoiles de Mougins ». Je me suis enfui à toutes jambes.

Quelques heures plus tard, j’étais à Cannes où la foule était à peine moins dense mais où il y a la mer et beaucoup d’espace. Qui se plaindrait de « devoir » arpenter la Croisette sous le grand soleil de cette mi-septembre ?

De Mandelieu-la-Napoule à Mouans-Sartoux

Sur la Côte d’Azur [Étape n°10]


Sur le chemin vers Mouans-Sartoux.

Javais réservé hier une chambre dans un de ces hôtels sans âme et à bas prix situés sur une aire commerciale, celle-ci au nord de Mandelieu-la-Napoule. Aussi étonnant que cela puisse paraître, ce fut un bon choix qui m’a permis de ne pas faire un détour pour passer ce matin dans un grand magasin de « distribution de produits culturels » et y racheter enfin le feutre noir waterproof que je cherchais sans succès depuis trois jours dans toutes les supérettes et papeteries croisées en chemin. Le précédent m’avait laissé en plan au beau milieu d’un dessin – a-t-on idée d’emporter du matériel en bout de course, aussi.

C’est donc alourdi de quelques grammes mais le cœur plus léger que je me suis éloigné de la côte pour me diriger vers l’arrière-pays cannois. Sans surprise les paysages ont été bien différents de ceux des jours précédents. Une fois éloigné des zones urbanisées, j’ai retrouvé des chemins poussiéreux passant entre les champs, parmi les serres (on récolte les aubergines en ce moment) ou dans les bois. Il a fait beau et assez chaud, avec heureusement beaucoup d’ombre. De temps à autre une petite chapelle ou un autel à la Vierge guidait le voyageur vers la sécurité du prochain abri.

Voilà. c’est tout. Il y a des soirs où même en cherchant bien on ne trouve rien de notable, rien qui justifie d’en faire le récit. En somme, les journées heureuses n’ont pas d’histoire, et ce fut une excellente journée. Je l’ai finie très fatigué mais content. Pierre Desproges, un jour de panne d’inspiration, à réussi jadis à faire rire son public en lui lisant sa dernière quittance de gaz. Je n’ai pas son talent (et d’ailleurs, je n’ai pas le gaz non plus), ce sera donc tout pour aujourd’hui.

De Saint-Raphaël à Mandelieu-la-Napoule

Sur la Côte d’Azur [Étape n°09]


Le viaduc d’Anthéor.

Grosse, grosse étape aujourd’hui entre le hameau d’Agay, à Saint-Raphaël, et Mandelieu-la-Napoule que je souhaitais atteindre aujourd’hui pour que mon étape de demain jusqu’à Mouans-Sartoux reste d’une longueur acceptable. Je me suis en effet résolu à programmer désormais mes étapes de toit en toit car cette côte hypertouristique est pauvre en chemins de randonnée mais riche en propriétés privées ce qui rend la tâche de trouver un site de bivouac quasiment insurmontable.

La journée a commencé par une grimpette vers les hauteurs dans le dédale de chemins et d’escaliers du Peysserin, un passage que j’avais eu bien raison de préparer minutieusement avant de partir car c’est un véritable labyrinthe. Elle s’est poursuivie par une descente abrupte sur un sentier pierreux vers la calanque d’Anthéor et son viaduc, qui étaient le premier de mes deux points de passage obligés du jour (parce que des Space Invader s’y trouvent, est-il besoin de le préciser ?)

Il faisait beau et le paysage était magnifique. Les reliefs abrupts et découpés, ocre et marron, qui dominent la mer bleue avaient un je ne sais quoi d’américain, comme un air de « Monument Valley sur la Riviera ».

J’avais envisagé de remonter ensuite sur les hauteurs avant de replonger vers mon second objectif intermédiaire, au-dessus des calanques de Maubois, mais mon genou droit en avait décidé autrement. Un peu capricieux depuis deux jours, il n’avait pas apprécié la descente vers Anthéor et j’ai jugé plus raisonnable de ne pas lui imposer une épreuve supplémentaire. Je suis donc resté sur la Corniche de l’Esterel qui offre elle aussi de très beaux points de vue sur le bord de mer.

Me servant au moins autant des oreilles que des yeux pour détecter dans les virages l’arrivée face à moi de véhicules heureusement assez peu fréquents, j’ai bien avancé en n’ayant jamais le sentiment de me mettre en danger, au prix toutefois d’une concentration de tous les instants.

J’ai ainsi atteint et « flashé » au passage ma deuxième mosaïque de la journée, posée sur une bâtisse délabrée couverte de graffitis et de peintures murales qui domine depuis un promontoire les calanques de Maubois, avant de continuer, un peu clopin-clopant quand même, ma longue promenade vers mon étape du soir où je suis arrivé fourbu et moulu mais content.

De Sainte-Maxime à Saint-Raphaël

Sur la Côte d’Azur [Étape n°08]


La Côte normande ? Non, Sainte-Maxime.

Sale temps aujourd’hui avec un ciel plombé malgré un vent très fort. La baisse de la température est impressionnante. Lorsqu’hier je me suis trempé dans la grande bleue, il faisait 26°C. Ce matin, il faisait 12°C, température vérifiée sur mon smartphone après que je me suis résolu à enfiler ma polaire parce que la marche n’arrivait pas à me réchauffer. La mer elle aussi était grise et il n’y avait personne sur les plages.

J’avais vaguement espéré qu’il me serait possible de rejoindre Saint-Raphaël en suivant un circuit assez tarabiscoté de chemins de randonnée mais j’ai rapidement dû me rendre à l’évidence : sauf à tripler les distances et à faire exploser le dénivelé (et probablement aussi mon genou), je ne pouvais pas faire autrement que suivre la route principale.

Je ne m’en suis finalement pas trop plaint car le fait de devoir marcher sur le bitume m’a fait avancer vite, aidé en cela par ce mistral violent qui ne donnait aucune envie de traîner en route. La plupart du temps il y avait un trottoir ou une piste cyclable protégée et dans la mesure où j’ai fini par ne plus prêter attention au bruit des voitures, marcher dans ces conditions le long de cette très belle côte n’a pas été désagréable.

Arrivé à Fréjus en début d’après-midi, j’ai pris le temps de faire le tour de cette petite ville que je ne connaissais pas pour y admirer quelques ruines romaines et visiter la très belle Cathédrale Notre-Dame et Saint-Léonce et le cloître attenant avant de rejoindre Saint-Raphaël où je vais passer la nuit.

De Cavalaire-sur-Mer à Sainte-Maxime

Sur la Côte d’Azur [Étape n°07]


CAZ_37, bien tranquille dans sa minuscule calanque.

J’ai quitté Cavalaire par la promenade Hubert Germain, Compagnon de la Libération récemment mort à 101 ans ; en parcourant ensuite sur toute sa longueur la magnifique plage de sable de cette ville je pensais aux 350.000 hommes, dont 250.000 Français commandés par le futur maréchal de Lattre de Tassigny, qui débarquèrent en Provence il y a tout juste quatre-vingts ans et en particulier sur la plage même où j’étais en train de marcher. Aujourd’hui, la mer était calme, le sable était chaud et doux et le barda que j’avais sur le dos était ultra-léger.

Une fois arrivé à l’extrémité de la plage, je me suis engagé sur un sentier côtier très accidenté et interrompu en plusieurs occasions par des propriétés dont les limites affleuraient les rochers escarpés du bord de mer. Sans doute ces propriétés ont-elles été construites et délimitées avant l’édiction de la Loi Littoral mais je ne vois pas en quoi la servitude de passage de trois mètres que celle-ci impose serait plus difficile à établir ici qu’ailleurs en France, à condition évidemment que les édiles en aient la volonté. Mais passons.

La promenade a donc été sportive, faite de montées-descentes de quelques dizaines de mètres avec de courts passages obligés sur des petites routes, jusqu’à atteindre ma mosaïque du jour, collée de manière inattendue à l’extrémité d’un muret dans une minuscule calanque. J’y ai bien sûr pris quelques photos et ce fut aussi pour votre serviteur l’occasion de vérifier que la température de la Méditerranée en septembre n’a rien à voir avec celle de la Manche !

Une fois arrivé à La Croix-Valmer, le chemin est devenu nettement moins pittoresque. Sans égaler les désagréments d’hier, il m’a quand même fait suivre de bonnes portions de bords de route, heureusement presque toujours sur une piste cyclable protégée du flux automobile par un muret de béton.

En deux occasions, des panneaux indiquant « La Madrague » (j’avais déjà vu hier ou avant-hier un panneau indicateur portant ce nom) m’ont rappelé que je n’étais pas loin de Saint-Tropez où se trouve la célèbre propriété de Brigitte Bardot qui porte ce nom. Je me suis très irrespectueusement dit qu’il était quand même bizarre que celle qui fut considérée comme l’une des plus belles femmes du monde ait choisi de faire son nid dans un endroit dont le nom désigne originellement un filet destiné à attraper les thons !

Après les plages du Débarquement de Provence dont on célébrait il y a peu le quatre-vingtième anniversaire, il est probable que ce sont les quatre-vingt-dix ans de B.B. dont nous entendrons bientôt parler. Brigitte Bardot après Hubert Germain, petite et grande histoire dans la même région.

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