De Saint-Colombier à Arzon
- Publié le Dimanche 22 septembre 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°72]
Au cours des derniers mois, j’ai acquis dans un but d’allègement plusieurs éléments de matériel que je n’ai pas encore eu l’occasion de tester. Je les ai emportés cette fois-ci plutôt que mon matériel habituel car il est temps que je choisisse les éléments du « big three » qui seront dans mon sac à dos à partir de mai prochain, au cours de la longue marche dont je compte parler ici bientôt…
Pendant près de dix ans, j’ai utilisé comme abri une tente double-toit Power Lizard 1-2P avec laquelle j’ai découvert le bivouac et qui m’a donné longtemps satisfaction. Ma conversion à la marche ultra-légère m’a amené à la remplacer par un poncho-tarp Gatewood Cape avec lequel j’ai bivouaqué l’an dernier entre Concarneau et Auray, puis par une tente monoparoi Plexamid de Zpacks, utilisée en particulier entre Auray et Vannes. Les deux abris sont de qualité. Le poncho-tarp est plus léger, plus spartiate aussi. La tente Plexamid, spacieuse et pourvue d’une moustiquaire, est un vrai palace.
À mi-chemin entre les deux, j’ai voulu tester l’abri Hexamid Solo que j’emmène avec moi cette semaine. C’est également un excellent abri. Il m’a parfaitement protégé la nuit passée d’une pluie prolongée accompagnée de quelques bourrasques. Il est un peu plus léger que la Plexamid mais il est moins grand et un peu moins pratique à utiliser. Je ferai un point final après quelques nuits supplémentaires mais je pense que mon choix définitif se fera probablement en faveur de la tente Plexamid.
En ce qui concerne le couchage : j’ai acquis l’an dernier sur le forum randonner léger un pied d’éléphant PHD en duvet (c’est à dire un sac de couchage court — 130 cm pour le mien — qui ne couvre que la partie inférieure du corps, la protection du haut contre le froid nocturne étant assurée par la doudoune). Conçu pour les participants au Marathon des Sables, c’est un remarquable objet, très léger et bien chaud.
Je l’ai utilisé l’hiver dernier comme doublure à l’intérieur d’un autre sac de couchage 0°C confort et ai dormi ainsi sans souci par -4°C. La nuit dernière, je l’ai couplé avec un sursac SOL Escape (pour tester aussi le confort de ce dernier) et je n’ai pas du tout eu froid pour une température minimale de +5°C. En revanche, il y a eu un peu de condensation dans le sursac, et le pied du sac de couchage était humide ce matin.
Je ferai d’autres test cet automne avec des températures plus proches de zéro, mais je ne pense pas pouvoir me contenter de cette association pour un long voyage au cours duquel on peut s’attendre à des variations thermiques importantes ; en outre, la condensation à l’intérieur de ce sursac est de mon point de vue rédhibitoire.
Lorsque j’ai levé le camp ce matin, il pleuvait encore. J’ai donc laissé l’abri à l’extérieur du sac à dos. Lorsqu’en fin de matinée le soleil s’est enfin montré, ses rayons bienvenus ont rapidement séché sac de couchage, sursac et toile de tente. J’avais à peine remis tout mon barda dans le sac qu’il s’est remis à pleuvoir. Promesse bretonne tenue : il a fait beau une fois aujourd’hui !
De Vannes à Saint-Colombier
- Publié le Samedi 21 septembre 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°71]
J’ai toujours un sentiment bizarre de téléscopage lorsque je relate ici le récit d’une nouvelle étape qui n’est séparée de la précédente que par quelques centimètres d’écran alors que plusieurs mois de ma vie se sont écoulés entre les deux… Il y a déjà sept mois que je suis arrivé à Vannes. C’était alors l’hiver, c’est maintenant bientôt l’automne. Le temps file.
Hier soir, une fois descendu du train de Paris, je me suis promené dans la ville en cherchant un restaurant. En Bretagne, évidemment, j’ai choisi une crêp… heu, non , un restaurant indien, pourquoi pas après tout ?
Couché tôt hier, levé tôt ce matin, et premières heures de marche pas folichonnes pour sortir de la ville, sur le bitume de zones pavillonnaires. Ce n’est qu’à partir du début de l’après-midi que j’ai enfin pu marcher sur des chemins en bord de mer. Il faisait beau, presque chaud.
J’ai rattrapé un autre randonneur, un grand blond de la trentaine avec des sandales aux pieds et sur le dos un sac de 70 litres qui pesait visiblement une tonne. Pas étonnant qu’il aille moins vite que moi ! Nous avons cheminé côte à côte un bon moment en discutant de nos parcours et du contenu de nos sacs à dos. Parti de Vannes lui aussi, il m’a expliqué marcher sans but bien défini, comptant longer la côte jusqu’à ce qu’il en ait assez et d’ici là, passer ses nuits sous la tente.
Distraits par notre discussion, nous n’avons pas vu que nous nous trompions de chemin et avons eu la surprise de voir soudain notre route barrée par une haute grille fermée par un gros cadenas. Tiens, et si on regardait la carte ? Ah ben zut, nous nous sommes engagés il y a plus d’un kilomètre sur une voie privée étroite, coincée entre la mer et un étang.
Mon compagnon a décidé de continuer en franchissant la barrière par l’extérieur en posant la pointe des pieds sur un muret de 10 cm de large, 8 mètres au-dessus de la grève et des rochers. Très peu pour moi, même avec un sac à dos bien moins encombrant que le sien… J’ai courageusement choisi de faire demi-tour en direction du GR. Je ne le regrette pas car cela m’a fait passer un peu plus tard à côté d’un bois à l’orée duquel j’ai trouvé un très agréable bivouac.
À la ligne (Joseph Ponthus)
- Publié le Mardi 21 mai 2019
- par Serval
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Joseph Ponthus, qui travaillait comme éducateur spécialisé en région parisienne, a démissionné pour rejoindre la femme qu’il aime à Lorient. Mais voilà , une fois en Bretagne, pas moyen de trouver un poste dans son domaine. Il a alors recours aux agences d’intérim qui lui proposent des contrats « d’opérateur de production » dans l’industrie alimentaire.
En clair, il travaille désormais à la chaîne — pardon, à la ligne — là où on a besoin de sa force de travail pendant quelques jours ou quelques semaines. Tri de crevettes, usine de poissons panés, égouttage de tofu, nettoyage d’abattoirs, déplacement de centaines de carcasses de bovins, composent désormais son quotidien.
Ponthus n’est pas un ouvrier classique. Il a une formation littéraire et un besoin d’écrire qui l’amène à raconter ce quotidien par touches successives au fil des mois qui s’écoulent. Usine et écriture. La ligne dont il est question, c’est à la fois la ligne de production et chacune des lignes d’écriture qui se succèdent en retours rapides dans ce récit fait d’une prose qui ressemble à des vers.
Au fil du temps et des courts chapitres, l’auteur dévoile peu à peu des pans de son monde. Ses études littéraires, l’amour pour sa femme — pudiquement effleuré et toujours présent — ses collègues, les chefs, les monceaux d’animaux morts, son chien Pok-Pok, sa maman.
Ni pathos ni misérabilisme dans ces « feuillets d’usine » ; pas de plainte malgré les douleurs et l’épuisement physique ; une résilience de tous les instants, de tous ces jours sans fin qui se suivent. Pour tenir, il a la littérature, romans et poèmes, les chansons de Trenet, ses souvenirs et la routine.
Voilà un grand livre. Un « récit prolétarien » comme on n’en avait pas lu depuis plusieurs dizaines d’années, et qui se passe ici et maintenant. En France, au XXIe siècle.
« C’est ignorer jusqu’à l’usine qu’on pouvait Réellement Pleurer De fatigue Ça m’est arrivé quelques fois Hélas non quelquefois Rentrer du turbin Se poser cinq minutes dans le canapé Et Comme un bon gros point noir que tu n’avais pas vu et qui explose à peine tu le touches Je repense à ma journée Sens mes muscles se détendre Et Explose en larmes contenues Tâchant d’être fier et digne Et ça passera Comme tout passe La fatigue les douleurs et les pleurs Aujourd’hui je n’ai pas pleuré » Joseph Ponthus — À la ligne (La Table Ronde, 2019) |
De l’Île-aux-Moines à Vannes
- Publié le Jeudi 28 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°70]
Le vent a soufflé fort cette nuit, sifflant dans les branches et faisant vibrer la toile de ma tente. J’ai eu besoin de mettre des bouchons d’oreille pour m’endormir mais en définitive j’ai bien dormi. Ce matin, le temps est couvert et il y a encore beaucoup de vent.
La fin du tour de l’Île-aux-Moines est vite expédiée et en moins de 2 heures je rejoins le bourg principal dans lequel j’achète de quoi déjeuner et que je visite en attendant le bateau. Vue de l’extérieur, la petite église ne paie pas de mine mais elle contient une très jolie sculpture de Vierge à l’enfant.
En quelques minutes de balade, je passe devant une herboristerie, un atelier de sculpture, un cabinet d’ostéopathe et bien sûr un magasin de souvenirs, situés à quelques mètres les uns des autres.
C’est drôle, deux populations coexistent dans l’île. Il y a d’un côté ceux que j’ai vus en en faisant le tour – des paysans, des pêcheurs, des ostréiculteurs – et de l’autre côté les citadin(e)s en loden ou en manteau de fourrure que je croise ici ce matin. D’un côté des tracteurs et des bateaux de pêche, de l’autre des scooters dernier cri traînant une élégante petite remorque pour y placer les courses. Ce village, c’est « Neuilly-sur-Golfe » ; qu’est-ce que cela doit être au mois d’août !
Une éclaircie se fait dans les nuages pendant les quelques minutes de la traversée jusqu’à Port-Blanc. Elle est de courte durée, et ce sera la seule de la journée. C’est sous un ciel bas et lourd que je finis ce tronçon supplémentaire de mon tour de Bretagne, via Arradon où de nombreux souvenirs m’attendent.
Et voilà, l’étape est finie… J’arrive à la gare de Vannes où je vais prendre une nouvelle fois le train pour Montparnasse. Une nouvelle fin de tronçon, encore une. Ce fut un tronçon particulier, plus îlien que continental. Il n’a duré que six jours, mais ce furent six très bonnes journées, avec un temps presque toujours beau et en tout cas sans une goutte de pluie, avec de beaux paysages et plusieurs bivouacs magnifiques. Que demander de plus, si ce n’est de pouvoir revenir le plus tôt possible ?
De Botconan à l’Île-aux-Moines
- Publié le Mercredi 27 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°69]
Il est vraiment très utile de pouvoir consulter sur son smartphone les photographies aériennes au 1/6.250ème des zones où l’on envisage de bivouaquer. C’est ainsi que j’ai repéré à l’avance l’endroit magique où j’écris ces lignes, dénommé Pointe de Kastell er Guévr.
Je suis assis sur des rochers en bord de mer. Derrière moi se trouve le bosquet de pins où j’ai trouvé ce superbe bivouac. Devant moi, un bras de mer me sépare du soleil qui se couche. La mer monte, elle sera au plus haut dans trois heures environ. La crique devant moi n’est qu’un grand parc à huîtres. J’entends tout en écrivant les cris de nombreux oiseaux, entre le roulement et le croassement. Il y a des canards, des sarcelles, des huîtriers-pies… Il fait sombre, je ne les vois pas bien mais je les entends !
Je suis parti ce matin un peu avant huit heures. Avec l’habitude, il devient plus rapide de se mettre en route car une routine s’installe pour le rangement des affaires dans le sac et l’ordre de ce que l’on fait. J’ai marché très agréablement, aujourd’hui encore avec un grand beau temps, bien que froid le matin. Je suis passé au sud de Baden puis ai fait le tour de Larmor-Baden et suis arrivé à Port-Blanc vers le milieu de l’après-midi.
Sur l’embarcadère, un bateau s’apprêtait à partir pour l’Île-aux-Moines… je suis monté dedans. Je ne l’avais pas prémédité mais sinon, au rythme où j’avance, j’arriverai à la gare de Vannes un jour trop tôt, alors autant ajouter une seconde île (dont la circonférence ne fait que 24 km) à cette portion déjà assez particulière de mon tour de Bretagne.
L’Île-aux-Moines est à l’évidence un endroit très touristique – en été, cela doit être insupportable – mais assez joli et avec du cachet dans les villages. Je ne regrette pas du tout cette décision de dernière minute.
Assis sur mon rocher en bord de mer, j’ai regardé le soleil disparaître de l’autre côté de la crique. La nuit est tombée, il fait maintenant assez sombre pour que je fasse ma toilette sans risquer d’effaroucher un(e) promeneur(se) tardif(ve).
D’Auray à Botconan
- Publié le Mardi 26 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°68]
Matinée charnière. Maintenant que j’ai fini le tour de Belle-Île, il me faut regagner Auray pour poursuivre le cours « normal » de mon tour de Bretagne. Après la soirée d’hier (lessive, toilette, rasage, crêperie), je me suis couché vers 21 heures et ai dormi d’un sommeil profond jusqu’à 7 heures du matin. L’avantage de dormir sous un toit – outre le fait qu’on soit dans un lit – c’est qu’on peut partir sitôt réveillé ou presque, sans avoir besoin de ranger tout son barda.
Après un détour par la boulangerie (mais ce n’était pas la même sympathique boulangère, adepte de randonnée, que samedi matin), je prends un billet sur le Bangor, départ à 9h45. Comme à l’aller, je m’installe sur le pont supérieur, bien emmitouflé car, s’il fait toujours aussi beau, il fait vraiment bien froid. À Quiberon, j’attrape le bus pour Auray où j’arrive peu avant midi pour un nouveau départ à pied, depuis cette gare où je suis arrivé et ai repris le train pour Paris il y a presque sept mois.
C’est une marche très différente de celle des jours précédents, quasiment sans dénivelé, sur des chemins tantôt champêtres, tantôt forestiers, longeant la rivière d’Auray et son affluent la rivière du Bono. Les paysages sont beaux et reposants, avec, à marée basse, de vastes zones de schorre où les oiseaux picorent leurs repas.

Alors que je remplis ma bouteille au robinet du cimetière du Bono, mes yeux se posent, par-dessus le mur d’enceinte, sur mon premier cerisier en fleurs de l’année. Vite, un vœu !
L’anse de Govillo est située dans un repli de la rivière du Bono. C’est là que beaucoup de bateaux sont amenés pour y finir leur vie. Plusieurs dizaines d’épaves gisent ainsi côte à côte sur la vase, donnant au lieu un caractère mélancolique. On ne peut s’empêcher de penser à la finitude dans un tel cimetière, près de ces carcasses qui pourraient aussi bien être des éléphants…

Près du hameau de Botconan, j’installe mon bivouac dans un bois de hêtres dont beaucoup sont morts et ont été livrés aux bûcherons. La préparation du terrain est un peu fastidieuse ; elle nécessite un nettoyage du sol méticuleux pour retirer les ronces et les débris, à un endroit que j’ai choisi un peu dégagé pour ne pas risquer qu’une branche morte y tombe pendant la nuit. Il me faudra plus d’une demi-heure, pratiquement centimètre par centimètre, pour être certain de ne pas laisser en place une épine traîtresse et perforatrice de matelas gonflable.
De Pouldon au Palais
- Publié le Lundi 25 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°67 - Belle-Île 3/3]
J’ai encore passé une excellente nuit. Il a fait +2°C au plus bas, je n’ai pas eu froid sous ma tente laissée grande ouverte, et au réveil il n’y avait pas la moindre condensation sur la toile. Prendre la Plexamid était décidément le bon choix. Départ vers 8h30, temps superbe aujourd’hui encore, et aujourd’hui encore des descentes, des remontées, des descentes, des remontées… Jusqu’à Port Andro, cela n’arrêtera pas, dur dur par moments.
Sur cette île, on voit la mer partout, mais le plus souvent on la voit de loin, ou d’en haut. Même quand on descend (avant de remonter, bien sûr…), c’est souvent un peu à l’intérieur des terres, pour franchir un ruisseau. Atteindre la mer, lorsque c’est possible, nécessiterait alors de faire un détour pas forcément facile en suivant le ruisseau. Donc, la mer, on la voit beaucoup, on ne l’approche pas tant que cela.

Mais finalement, la pointe arrive et peu de temps après c’est la récompense à mes efforts : une famille de bouquetins, papa, maman et ado bouquetins, assez peu farouches pour continuer à grignoter des jeunes pousses à quelques mètres de moi pendant plusieurs minutes. Ils font mine de ne pas prêter attention à moi mais j’ai bien compris leur manège : en fait, ce sont de vrais cabots qui posent sans en avoir l’air pour mes multiples photos.
Après cet intermède animalier, nouveau détour, cette fois-ci vers le cimetière de Locmaria, pour chercher de l’eau – j’ai fin par consommer toutes mes réserves – puis retour sur la côte. Déjeuner sur la plage de Port-Andro, suivi d’une petite sieste au soleil avant de repartir pour la portion la plus facile du parcours, jusqu’au Palais.
Arrivé au Palais peu avant 19 heures, que faire ? Je pourrais reprendre tout de suite le bateau mais une fois à Quiberon, où trouverai-je à la nuit tombée un bivouac dans le sud urbanisé de la presqu’île ? Quitte à devoir y chercher un hôtel, autant reprendre ici la même chambre que vendredi soir (et retourner dîner dans la même excellente crêperie). Aussitôt pensé, aussitôt fait. Attention bonhomme, tu t’encroûtes !
Tour de Belle-Île : au total, environ 79 km et 1.650 m de dénivelé positif et négatif.
De Borcastel à Pouldon
- Publié le Dimanche 24 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°66 - Belle-Île 2/3]
Comme souvent en bivouac, je me suis réveillé plusieurs fois pendant la nuit mais à chaque fois je me suis très vite rendormi après avoir simplement changé de position. L’association duvet + sursac m’a permis de ne pas avoir froid alors que j’avais laissé les ouvertures de la tente grandes ouvertes. J’avais craint hier soir d’être gêné par la lumière du phare des Poulains qui traversait la paroi translucide de la Plexamid, mais cela n’a pas été le cas.
J’ai le plaisir de voir au matin qu’il n’y a pas la moindre ébauche de condensation sur la toile. C’est sans doute dû en partie au fait d’avoir gardé la tente ouverte, probablement aussi à mon choix d’un site de bivouac un peu éloigné de la mer et sous le couvert des arbres. De fait, alors que le sol de la minuscule pinède où j’ai dormi était parfaitement sec, il suffira que je me rapproche de la mer pour marcher sur un sol détrempé.
Il fait très beau : le ciel est bleu, il n’y a pas un nuage et pratiquement pas de vent. Il ne fait pas chaud, en revanche, et la doudoune n’est pas de trop pour marcher. Parti peu après huit heures, je me dirige d’abord vers le hameau de Kerguec’h avec l’espoir d’y demander de l’eau, mais un dimanche matin à cette heure-là il n’y a que les chiens qui soient réveillés lorsque j’y arrive (certes, avec le raffut qu’ils font à mon passage, il est probable que leurs maîtres le sont aussi lors que j’en repars…)
Jusqu’à Donnant, la marche est facile, essentiellement sur de la lande, avec seulement deux ou trois descentes/ montées. À Donnant, je n’ai plus d’eau. Je décide alors de remonter vers le bourg, à 700 mètres, car la carte IGN indique là-bas la présence d’une fontaine. Macache. Il n’y a là qu’un trou boueux au fond d’un amas de ronces. Heureusement, dans le village, un homme courageux s’est levé tôt pour planter des crocus dans son jardin, ce qui me permet de lui demander de remplir ma bouteille d’un litre et également, par prudence vu la rareté des points d’eau sur l’île, ma Platypus de secours.

À partir de Donnant, c’est beaucoup plus sportif. Ça descend et ça remonte à chaque plage, à chaque crique, à chaque ruisseau, avec souvent peu de terrain plat entre deux. Mais les paysages sont magnifiques, la mer s’élance sans cesse à l’assaut de la côte découpée, formant des anses abruptes et des rochers ciselés, comme les célèbres « Aiguilles de Port-Coton ».
La dernière heure de la journée est un peu rude, ce qui m’amène à quitter le bord de mer à 17 heures pile pour me diriger vers une zone repérée sur la carte qui paraît être un petit bois. Et de fait, banco, c’est bien un bosquet, d’ailleurs récemment livré aux bûcherons, au sein duquel je trouve un coin pas trop difficile à débarrasser des branches cassées ou coupées. Comme hier, je vais dormir sur un moelleux tapis d’aiguilles ! Toilette complète, dîner, écriture de ces mémoires, et dodo !


Je l’ai transportée dans deux « gobelaits » (des culs de bouteilles de lait) emboîtés servant de bols, pour un poids total inférieur à cent grammes. C’est pratique à transporter et séduisant en théorie, mais une fois qu’on a mis des aliments – disons,au hasard, de la purée – dans un gobelait, les rainures de celui-ci empêchent de le récurer correctement et on est obligé de ranger la popote dans un récipient mal nettoyé.
J’ai trouvé une parade provisoire en protégeant la popote dans un sac ziploc, mais ce qui est parfait pour ne faire que du café ne l’est donc pas vraiment lorsqu’il s’agit d’y mettre de la nourriture cuisinée. Un point à améliorer, donc.
Du Palais à Borcastel
- Publié le Samedi 23 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Étape n°65 - Belle-Île 1/3]
Réveil à sept heures, lever sans me presser, départ à huit heures et demie. J’ai prévu de faire ce tour de Belle-Île dans le sens anti-horaire. Il fait un temps superbe avec un soleil radieux. Un passage à la boulangerie me permet d’acheter un croissant et un pain aux raisins (je ne me refuse rien) et de discuter le bout de gras avec la boulangère. Elle est elle-même férue de randonnée, mais elle n’a pas encore eu l’opportunité de faire tout le tour de son île.
Pour bien commencer la journée, je me trompe immédiatement de chemin en suivant le port jusqu’à l’autre côté du débarcadère, ce qui m’oblige à revenir sur mes pas avant de pouvoir traverser la citadelle Vauban et de sortir de la ville. Première constatation : je ne suis pas en grande forme physique, et j’ai du mal dès que le chemin monte un peu. Il n’y a pourtant pas de longues côtes, mais ça monte et ça redescend sans arrêt, en « casse-pattes », et certaines pentes sont vraiment très… pentues. Bon. Aujourd’hui, cela va donc être « chi va piano… va molto piano ».

Un peu plus tard, je la rejoins alors qu’elle est assise au bord du chemin en grignotant un morceau. Je m’excuse de lui avoir mis la pression un peu plus tôt, on discute et on repart ensemble pour un bout de chemin.
Juliette fait elle aussi le tour de Belle-Île, mais en quatre jours et dans le désordre car elle ne bivouaque pas et n’a trouvé d’endroits où se loger qu’au Palais et à Bangor. Elle a marché hier du Palais à Locmaria d’où elle est retournée en stop à son hôtel du Palais, elle compte aller aujourd’hui jusqu’au phare des Poulains et retourner ensuite au Palais, également en stop, et c’est toujours en stop qu’elle compte aller demain à Locmaria pour en repartir en direction de Bangor.
Quand je lui dis que je vais bivouaquer, elle s’étonne de la petite taille de mon sac et me pose des tas de questions. Je lui parle de la randonnée légère, de ce blog et du forum randonner léger où elle me dit qu’elle ira jeter un œil, et je déballe mon sac sur le bord du chemin pour lui montrer mon matériel. On se quitte au bord de la ria de Sauzon où je m’arrête à mon tour pour déjeuner et faire une petite sieste.
Une fois de l’autre côté de la ria, je profite que les toilettes du port de Sauzon soient ouvertes pour y remplir mes bouteilles avant de me diriger vers la pointe des Poulains. J’ai bien fait d’être prudent car les toilettes de l’Espace Sarah Bernhardt sont fermées, comme est fermé le musée construit dans ce qui fut auparavant un fort, puis la maison de l’actrice.
À partir de la Pointe des Poulains, on passe du côté de l’île exposé au large et en quelques centaines de mètres la mer change du tout au tout. Calme jusque-là, elle devient très agitée alors même qu’il n’y a pas un poil de vent. Le sol, en revanche, est nettement plus plat et régulier. C’est de la lande avec juste quelques « casse-pattes » de 20 ou 30 mètres pour ne pas perdre la main – enfin, les jambes – mais sans plus.

Je continue mon chemin et m’enfonce dans les terres d’environ deux cents mètres, ce qui est suffisant pour trouver un excellent site de bivouac dans une toute petite zone plantée d’un vingtaine de pins dont les aiguilles recouvrent le sol d’un tapis moelleux. J’espère que l’endroit permettra d’éviter les ennuis décrits par mes récents prédécesseurs qui se sont retrouvés trempés au matin. Je saurai cela demain.
Aux marches du Palais
- Publié le Vendredi 22 février 2019
- par Serval
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Tour de Bretagne [Interlude]
Plus de six mois se sont écoulés depuis qu’à Auray j’ai repris le train pour Montparnasse… Entretemps, j’ai randonné sur quelques longs week-ends, j’ai remplacé une partie de mon matériel, j’ai passé beaucoup de temps sur le forum randonner-léger (RL), et j’ai commencé à réfléchir sérieusement à la longue marche que je prévois de faire en 2020 entre Paris et Syracuse.
Un participant du forum RL m’a donné l’idée de faire le détour de Belle-Île, où je n’avais pas envisagé d’aller lorsque je suis passé par Quiberon l’été dernier. J’ai donc ajouté le tour de l’île à ce nouveau tronçon de mon Tour de Bretagne, envisageant de le faire en sa compagnie et en celle de quelques autres marcheurs ultra-légers. Le décalage entre les calendriers scolaires de Bretagne et de l’Île-de-France ne l’a pas permis ; ils sont partis la semaine dernière et ont relaté quatre journées très agréables et trois nuits très humides.
Malgré leurs conseils, j’ai décidé de ne pas emporter ma tente double toit Power Lizard (neuf ans et toujours d’attaque) mais de prendre le risque de l’humidité en étrennant la tente simple toit Plexamid achetée récemment.
Depuis Montparnasse, j’ai rejoint Auray en deux heures et demie, inconfortablement coincé entre un voisin de gauche obèse et un voisin d’en face aux longues jambes. Ensuite, une petite heure de car jusqu’à Quiberon où j’ai pu attraper le bateau de 19h00 pour le Palais. Le soleil se couchait quand le bateau a quitté Quiberon, il faisait nuit en arrivant à Belle-Île. Depuis la mer, on voyait de loin les lumières du Palais, en face, et de Sauzon, plus à droite. Encore plus à droite, le phare des Poulains. À gauche, une lumière rouge qui devrait être celle du phare de la Jument.
Il ne faisait pas froid, mais pas bien chaud non plus. J’ai bien supporté, sur le pont supérieur, l’association micropolaire + doudoune + coupe-vent.
Dîner dans une crêperie sympathique, puis repli dans la chambre d’hôtel réservée il y a une semaine ; simple, propre et pas chère, parfait pour une bonne nuit en prévision des kilomètres à venir.