Les croix des chemins
- Publié le Lundi 22 novembre 2010
- par Serval
16 commentaires
Traversée Nord-Sud, étape n°9 : Hesdin -> Crécy-en-Ponthieu (dimanche 05/09/2010).
Vous pouvez aussi voir ici la liste de toutes les étapes de la Traversée Nord-Sud.
Lorsque j’étais enfant, mon mécréant de père avait l’habitude de se moquer gentiment de ma mère qui, en bonne Bretonne, se signait à chaque calvaire rencontré sur les routes des Côtes d’Armor. Il lui disait que « dans ce pays, se signer à chaque croix devant laquelle on passe en voiture devient quasiment une occupation à plein temps ».
Sur les tombes des cimetières blottis autour des églises de village ou longés à la sortie du bourg, des croix. Sur les monuments aux marins disparus de la côte d’Opale, des croix. Aux croisements des routes, des croix. Au bord des champs, le long des chemins d’exploitation, des croix.
Il suffit de sortir des grandes villes pour que le passé chrétien de « la fille aînée de l’Église » se rappelle à notre souvenir. La principale raison pour laquelle le voyageur s’en rend moins compte de nos jours, c’est qu’on ne les voit pas depuis l’autoroute. Quand on se promène à pied, on les voit, et on en voit beaucoup, de tous styles, grandes ou petites, modestes ou monumentales. Croix de bornage, croix de procession, croix de christianisation, croix de justice ; croix nues et calvaires ; croix de pierre, croix de bois, croix de fer.
Découvertes par hasard au croisement d’un chemin ou repérées depuis longtemps sur la carte, elles confirment où l’on se trouve. Elles renseignent sur la distance parcourue. Elles servent de guide pour la suite.
Pour les croyants sans doute, elles représentent quelque chose de plus, mais il n’y a pas besoin d’être croyant pour avoir du plaisir à les trouver sur son chemin. Pour tout marcheur, elles sont une rencontre virtuelle avec d’autres hommes. Bien que, dans la plupart des cas, le message précis laissé par ceux qui les ont dressées nous échappe, elles sont un témoignage de présence humaine, une trace de la puissance créatrice, artistique et spirituelle des gens qui ont vécu là, jadis ou naguère.
saunier helene
il est tellement dommage de perdre toutes les croix des chemins …et je me suis prise à photografier les croix que je rencontre et depuis j.ai toujours mon appareil avec moi au cas ou une croix se presenterais au bord d’un chemin…quel beau patrimoine que nous avons j’ai quelques photos et j.enrichie ma collection….a plus de vous lire
Serval
Bonjour Hélène. Belle idée de collection, il y a tellement de croix différentes. Je ne suis pas si sûr qu’elles disparaissent d’ailleurs, on en voit toujours beaucoup quand on emprunte les chemins.
Llann Créü
Bonjour.
J’ai, moi aussi, créé un site traitant des croix de mon voisinage et, si cela ne vous dérange pas, je sollicite l’avis de personnes qui s’y connaissent. Lignesbleues semble avoir un avis pertinent sur la chose. Je ne suis pas un ‘pro’ des croix mais pense qu’elles méritent que l’on s’y arrête, physiquement ou virtuellement.
Je vous invite donc à visiter mon site afin de l’éclairer de vos lumière techniques et de donner votre avis sur son contenu.
Vous souhaitant bonne année.
.llann.
Serval
Bonjour Llann, bonne année à vous aussi.
Je suis allé me promener sur votre site, il commence à y avoir un joli petit nombre de photos de croix diverses et variées ! J’en photographie un certain nombre aussi, mais ne le fais pas de façon aussi systématique que vous. Je ne vous propose pas de vous donner des photos puisque je ne vais pas passer en Bretagne lors de ma Traversée Nord-Sud.
Comme vous l’avez compris, s’il y a une spécialiste des croix « ici », c’est Lignesbleues !
Cordialement.
Llann Créü
Merci à vous, Serval, d’avoir pris le temps de visiter mes galeries de croix.
Mon précédent message s’adressait aussi à Lignesbleues. J’ai découvert votre site grâce aux mots clés (le sésame de la recherche) ‘croix’ et ‘chemin’. Je me suis donc rendu compte que je (nous) ne suis (sommes) pas le(s) seul(s) à avoir eu cette idée. Mais rares sont ceux qui détaillent la typologie de ces bornes religieuses, sujet qui m’intéresse, non par croyance, mais par curiosité. Toutes informations et précisions sont les bienvenues …
Pour 2011, je souhaite que la sérénité du cheminement vous porte par monts et par vaux. J’ai, d’ailleurs, envie de vous poser plein de questions quant aux motivations qui vous font marcher de la sorte (il faut que je prenne le temps de finir de parcourir votre blog).
Après Cerbère (très joli coin), vos Pataugas vous mèneront-elles à St Jacques de Compostelle ?
Et comme disait Phil Ozof : » Le bout du chemin est invisible, sauf celui d’un cul-de-sac ».
Bon courage à vous et bonne route.
.llann.
Llann Créü
P.S. : Ooooops … J’ai oublié de vous demander si vous connaissez Panoramio et si vous postez sur ce site. Je le fais ( http://www.panoramio.com/user/spkn ) car je trouve que c’est un très bon outil de partage de photos qui aide à la découverte de nos campagnes.
.llann.
Serval
Merci pour vos souhaits, Llann. Tous mes voeux également. C’est justement pour « cheminer sereinement » que je n’ai pas l’intention de marcher sur les étapes du Compostelle où il y a beaucoup trop de monde à mon goût. J’en ai un peu parlé dans ce billet.
Llann Créü
Je vous comprends. Ma mère le fait par étapes et m’a expliqué le fonctionnement de certains Espagnols sur cet axe : cela fait bien sur un C.V. d’avoir été jusqu’à Saint Jacques, alors ils font seulement les 100 derniers km (109 ? 111 ?) pour avoir leur petit tampon et se retrouvent très (trop) nombreux à la même époque au même endroit.
Lignesbleues
voir la note et le commentaire qui devrait vous intéresser http://2yeux.blog.lemonde.fr/2010/12/07/vita-brevis-1/ (Kérouac)
Serval
Dans ce registre de citations, une qui m’a marqué récemment est de Bruce Chatwin :
« Quelle est votre religion ? me demanda Ali. Vous êtes chrétien ?
— Je n’ai pas de religion particulière ce matin. Mon dieu est le dieu des marcheurs. Si vous marchez assez longtemps, vous n’avez probablement besoin d’aucun autre dieu. »
(En Patagonie)
Quotiriens
Et tous les crucifix suspendus au-dessus des lits dans nos campagnes…
Votre commentaire sur le Christ de Vérone vu chez Kyste m’évoque celui que j’avais posté sur une autre évocation de supplice lors d’une visite au musée « Fenaille » de Rodez.
Enfin, me revient également cette phrase de Tolstoï, lue récemment je ne sais plus où, et qui dit que les pèlerinages sont des prières faites avec les pieds!
Serval
J’aime vraiment beaucoup les croix nues, surtout celles en pierre, comme celle de ma deuxième image, comme j’aime toutes les traces laissées par nos prédécesseurs le long des chemins.
Concernant les représentations de la crucifixion, je vous renvoie à ce que j’avais écrit à « Kystes » il y près de deux ans en commentaire d’un article de son blog (Billy était mon pseudo d’alors). Mais les calvaires, pour moi, ce sont des madeleines !
miriam
je n’aime pas beaucoup les calvaires mais je déteste encore plus les entrées de villes et villages phagocytées par les Zac, Zup, et autres hangars commerciaux…
Lignesbleues
juste une observation : la typologie des croix n’a plus de secrets pour moi (déformation professionnelle). Les croix de procession sont donc à classer dans la catégorie des objets mobiliers (comme leur nom l’indique) et ne peuvent donc figurer dans les termes spécifiques du générique croix monumentale (de chemin, de carrefour…), catégorie qui relève de l’approche architecturale. Un breton comme vous ne l’ignore probablement pas ? Mais bon, l’environnement sémantique de la note et le genre littéraire auquel elle appartient offrent quelque liberté.
Serval
Ah, vous êtes spécialiste ? Damned. Le terme que j’ai employé est sans doute imprécis. Je ne parlais pas des croix que l’on porte ou portait bien sûr, mais de certaines croix servant de relais aux processions. J’aurais peut-être dû écrire croix de rogation ? elles sont en pierre, souvent très simples, avec un socle.
Lignesbleues
Eh oui, mais c’était dans presque une autre vie. N’en tirez cependant aucune conclusion sur mes obédiences religieuses, elles seraient forcément erronées (plutôt Pascal que Descartes, et Elle n’est pas venue, comme dirait Brassens).
D’accord pour les rogations.
Sans rapport avec le sujet précédent : j’ai oublié de vous signaler un auteur hongrois que vous connaissez peut-être : Sandor Marai, et en particulier Les braises (Livre de poche). Il a écrit aussi des textes qui éclairent l’histoire européenne du début du XXème siècle.
Allez, cela vaut bien la pause cigarette (je ne fume pas) mais il faudrait se remettre au travail. Bonne journée.