Les rues de Saigon

Dans une rue de Saigon
La ville où je viens d’arriver ne s’appelle plus réellement Saigon mais Ho Chi Minh-Ville depuis 1976. Tous ses habitants continuent pourtant à l’appeler ainsi — sauf les officiels, et ce blog est tout sauf officiel, alors…

Le nom de Saigon dérive paraît-il d’un terme khmer signifiant « forêt de kapokiers ». Le village originel était en effet, il y a quelques siècles, un comptoir commercial khmer situé à l’extrémité sud-est du Cambodge, dans une région marécageuse et couverte de forêts. Ce sont les Vietnamiens qui lui donnèrent ce nom, auquel ils tiennent visiblement, lorsqu’ils conquirent la région au 18e siècle.

Ce qui est vrai pour la ville l’est aussi pour les noms de rue, qui ont souvent changé deux ou trois fois depuis la seconde guerre mondiale. Tous les noms de rue français ont disparu en 1954 après Dien Bien Phu, sauf quatre : Louis Pasteur, Albert Calmette, Alexandre de Rhodes et Alexandre Yersin. Pourtant, on aurait tort de croire que cela ait beaucoup fait changer les habitudes des Saigonais.

Par exemple, la fameuse rue Catinat a été rebaptisée Ðuong Tu Do (Rue de la Liberté) en 1954, puis Ðuong Dong Khoi (Rue du Soulèvement populaire) après la réunification en 1975, mais beaucoup de gens l’appellent toujours de son ancien nom. Pour les artères moins connues, il peut arriver qu’un chauffeur de taxi doive demander à un collègue quel est l’ancien nom de telle ou telle rue pour savoir où emmener ses clients.

A toute heure du jour à Saigon, les rues sont envahies par des milliers de deux-roues, motocyclettes surtout et vélos. Moins nombreuses, les voitures et les cyclopousses complètent le tableau. Il n’est pas rare de voir trois ou quatre personnes sur un seul scooter, ou des charges impressionnantes posées sur le porte-bagage dans un équilibre à l’évidence moins instable qu’il y paraît puisqu’on ne voit jamais rien tomber.

Toutes ces mobylettes se croisent dans une complète anarchie, mais avec une précision et une efficacité impressionnantes, très similaires aux chemins sinueux que suivent les piétons dans une gare un jour d’affluence : ils calculent leur trajectoire, obliquent un peu à gauche ou à droite pour éviter les autres obstacles mobiles, ralentissent ou accélèrent, et se croisent aux carrefours d’une manière presque aussi impeccable que les motards de la Garde Républicaine. « Et les feux rouges alors ? » me direz-vous. Ah ah, vous, vous ne connaissez pas ce dicton vietnamien : « Les feux rouges, en Allemagne, c’est impératif. En Italie, c’est facultatif. Au Vietnam, c’est décoratif ».

Mobylettes à Saigon
Ce qui est également assez décoratif, ce sont les tenues des cyclomotoristes. Beaucoup d’entre eux se protègent de la pollution par des masques que les dames et demoiselles assortissent habituellement au reste de leur tenue.

La pollution n’est toutefois pas la seule raison de ces masques. La coquetterie s’y mêle aussi, qui explique les longs gants colorés portés par beaucoup de femmes malgré la chaleur pour protéger leur peau du soleil : comme c’était le cas chez les européennes de la « bonne société » jusqu’aux années 1930 en Europe, il est ‘chic’ au Vietnam d’avoir la peau la plus claire possible.

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